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 CM – POUVOIR ET SOCIÉTÉ EN FRANCE AUX 11ÈME ET 12ÈME SIÈCLES – MME AVIGNON - Partie 3

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CM – POUVOIR ET SOCIÉTÉ EN FRANCE AUX 11ÈME ET 12ÈME SIÈCLES – MME AVIGNON - Partie 3 Empty
MessageSujet: CM – POUVOIR ET SOCIÉTÉ EN FRANCE AUX 11ÈME ET 12ÈME SIÈCLES – MME AVIGNON - Partie 3   CM – POUVOIR ET SOCIÉTÉ EN FRANCE AUX 11ÈME ET 12ÈME SIÈCLES – MME AVIGNON - Partie 3 I_icon_minitimeMer 23 Avr - 11:27

LE POUVOIR ROYAL CAPÉTIEN (987 – 1223)


Il y a une pénurie documentaire concernant les actes capétiens, notamment pour le premier siècle capétien, c'est-à-dire le 11ème siècle ap. J.C. Il y a un changement sous le règne de Philippe II Auguste qui mène une politique documentaire active. Les sources narratives sont précieuses, notamment celles émanant de grands centres de production monastiques, qui se sont fait une spécialité de l'historiographie royale. Le premier et le plus ancien à s'imposer dans l'historiographie est le monastère de Fleury sur Loire, près d'Orléans. Longtemps appelé Saint Benoit sur Loire, c'est un monastère ancien disposant du riche bibliothèque qui fut l'un des points d'appui essentiel d'Hugues Capet. Il a à sa tête de 988 à 1004 un abbé du nom d'Abbon de Fleury, qui est l'instiga- -teur d'une politique de copie massive de manuscrits permettant au monastère de s'imposer comme le premier centre de production monastique. Il est attentif à former de nombreux moines à la grammaire et à la rhétorique. L'un de ces moines est Aimoin de Fleury qui écrit une Histoire du peuple ou des rois des Francs (titre reconstitué), ouvrage dédié à Robert II le Pieux et partant des origines légendaires du royaume des Francs pour s'arrêter en 654. A la fin du 12ème siècle Aimoin de Fleury à des continuateurs complétant le noyau initial de l'ouvrage. Philippe I est enterré à Fleury sur Loire, c'est un choix symbolique très fort. En 1115 est composé à Fleury sur Loire un ouvrage dans lequel on cherche à raconter les règnes allant de Charles le Chauve à Philippe I. Il témoigne de la conscience que les rois de France constitue une sorte de généalogie ininterrompue en dépit du changement de dynastie.

Au 10ème siècle s'impose un second centre de production monastique : Saint-Denis. C'est une abbaye ancienne fondée par le roi Dagobert au 6ème siècle et qui possède une histoire très proche des rois mérovingiens et carolingiens. C'est avec l'abbé Suger de Saint-Denis que l'abbaye prend une importance considérable dans l'histoire royale par la mise en place d'une historiographie ambitieuse. Les moines sont envoyés dans les grands monastères du domaine royal pour enrichir la bibliothèque de l'abbaye. On parle d'école dionysienne (caractère commun à l'ensemble des œuvres produites à Saint-Denis). Les moines de Saint-Denis ont le soucis d'enraciner l'histoire des rois francs dans un passé le plus lointain possible et d'asseoir le prestige du jeune royaume sur la grandeur carolingienne. Il y a là la volonté de tisser des liens symboliques entre le pouvoir capétien et le pouvoir carolingien, le soucis d'exalter la dynastie capétienne. L'abbé Suger lui-même prend la plume pour écrire deux vies : celle de Louis VI et le début de celle de Louis VII. Il amorce à Saint-Denis la tradition d'écrire l'histoire des rois contemporains. Cela ne l'empêche pas d'avoir une certaine préférence. En effet, le portrait qu'il fait de Philippe I dans la Vie de Louis VI est négatif afin de mettre en valeur son fils Louis VI. En ce qui concerne le règne de Philippe II Auguste il existe plus de sources narratives. Le moine Rigord en écrit une biographie : il est présenté comme un roi inespéré et attendu. Rigord apporte sa pierre à l'édifice historiographique de Saint-Denis. Les grandes chroniques de France ne se mettent en place qu'à la fin du 13ème siècle par un moine de Saint-Denis compilant toutes les biographies et chroniques … composées à Saint-Denis.

1. Une nouvelle dynastie : atouts et faiblesses des premiers capétiens.

Hugues Capet : 987 – 996
Robert II le Pieux : 996 – 1031
Henri I : 1031 – 1060
Philippe I : 1060 – 1108

1.1. Le changement de dynastie de 987.

987 est une date charnière dans la mesure où l'on assiste à un changement de dynastie. 987 n'est cependant pas vécu par les contemporains comme une révolution. En effet, en 987 monte sur le trône un descendant de Robert le Fort, mais cela fait presque un siècle que Carolingiens et Robertiens alternent au pouvoir car en effet les Robertiens ont la force nécessaire pour défendre le royaume en cas de besoin. Cela es donc vécu comme une nouvelle alternance du pouvoir d'un Carolingien à un Robertien. Cependant, l'arrive d'Hugues Capet permet l'émergence de la dynastie capétienne. Dès le fin de l'année 987, il fait sacré son fils Robert pour assurer la pérennité du pouvoir de sa famille. Avant ce sacré, rien ne laisse penser l'installation d'une nouvelle dynastie.
De plus, il y a toujours un carolingien en vie : Charles de Basse Lorraine. En 986 meurt Lothaire, qui laisse deux fils : Louis V, sacré depuis longtemps en accord avec la tradition depuis Pépin le Bref, qui reprend la politique agressive de son père à l'égard de la Lotharingie. Il s'oppose donc au très puissant archevêque de Reims : Adalbéron de Reims. Les prétentions lotharingiennes des Carolingiens vont à l'encontre de celles de l'empereur et des Robertiens. Louis V réunit à Compiègne une assemblée pour juger Adalbéron de Reims car il s'oppose aux offensives. Il meurt d'un accident de chasse au mois de mai et n'assiste pas à l'assemblée, qui est cependant maintenue par Hugues Capet. Hugues Capet est duc des Francs (dux francorum) et chef de la maison Ro- -bertienne. Il contrôle le marquisat de Neustrie. Depuis peu s'est répandue l'idée de ne transmettre qu'à un seul fils l'ensemble des titres et des terres afin de ne pas fragmenter l'héritage familial. Reprenant le royaume en main après la mort de Louis V, il transforme le procès d'Adalbéron de Reims en grâce, celui-ci devenant le principal appui d'Hugues Capet. Adalbéron de Reims fait réunir une assemblée de grands dignitaires ecclésiastiques pour élire un nouveau roi en dépit de l'existence de Charles de Basse Lorraine, devenu son ennemi.

Une seconde assemblée se tient fin mai 987, réunissant les grands princes. Ils décident de suivre les conseils d'Adalbéron de Reims, éconduisent Charles de Basse Lorraine et élisent Hugues Capet roi des Francs. Adalbéron écrit un célèbre discours dans lequel il justifie son choix : Charles n'est pas selon lui digne d'être roi car il a épousé la fille d'un de ses vassaux. Il cherche à le décrédibiliser. Il vante les qualités de l'esprit, de la noblesse corporelle et non plus celle du sang. Le pape Zacharie met en avant qu'il fallait donner le titre de roi à celui ayant la capacité d'exercer le pouvoir royal. Le discours d'Adalbéron de Reims justifie que les grands se soient tournés vers Hugues Capet : il dispose d'un réseau d'alliances, il a épousé la sœur du duc d'Aquitaine, ses beaux frères sont les duc de Normandie et de Haute Lorraine. Hugues Capet est donc acclamé roi et sacré en juillet 987 à Noyons par l'archevêque de Sens. La légitimité politique est symbolisée par le sacre. Son autorité est pleinement établie, tant sur le plan militaire que politique. En 991, Charles de Basse Lorraine est trahit et livré par Adalbéron de Lens, neveu d'Adalbéron de Reims, à Hugue Capet. Jeté en prison, il y meurt peu après. Le changement dynastique est donc en place en 991.

Le règne d'Hugues Capet est bref car il accède au pouvoir à un âge avancé. Après une dizaine d'années de règne, il n'a que rarement fait fonctionner sa chancellerie. Il n'est maître que d'un territoire réduit, impossible à confondre à celui du royaume. En effet, le domaine royale est exiguë car il est grignoté par les comtes et les princes. A l'intérieur du domaine royale, des seigneurs hostiles à Hugues Capet usurpent des prérogatives : les Montmorency, les Montlhéry. Certaines principautés autour du domaine royal sont plus puissantes que celle du roi lui-même : le comté de Blois avec Eudes de Blois, le comté de Vermandois, le comté d'Anjou avec Foulques Néra, le comté de Normandie avec Richard. Toutefois, aucun d'eux n'est dux francorum et ne bénéficie du privilège du sacre. Malgré tous les atouts qui sont les sien, le pouvoir royal capétien reste faible. Hugues Capet instaure une dynastie dont les membres sont princes parmi les princes au sein de l'aristocratie, bien que souvent moins puissant qu'eux.

1.2. Au 11ème siècle : une nouvelle échelle d'exercice du pouvoir.

1.2.1. Le déclin du pouvoir capétien.


Une analyse des actes sortis de la chancellerie royale laisse à penser aux historiens qu'il y avait une baisse dans le niveau d'autorité du pouvoir royal capétien. Il y a en effet un raréfaction des documents et la manière dont ils sont composés change. Les historiens mettent en avant que le niveau social des souscripteurs signant le bas du document est de plus en plus modeste. En effet, pour donner de la valeur à un acte de droit privé, on écrit le  nom de qui est présent lors de la rédaction du document. Les personnes ainsi convoquées sont de moins en moins importantes lors du règne d'Hugues Capet. Il ne s'agit plus de grands princes ou de grands dignitaires ecclésiastiques mais de seigneurs du domaine royal ou encore de chevaliers. On constate donc que le nom du roi ne suffit plus à donner suffisamment d'autorité à ses actes de droit privé. Avant le milieu du 12ème siècle, aucun texte à valeur législative ne sort de la chancellerie royale. Certains historiens du droit comme Lemarignier interprètent cela comme un soucis pragmatique du roi et de sa chancellerie à solliciter ceux qui peuvent de fait être réellement présent. Sous le règne de Robert II le Pieux, il y a moins d'actes qu'à l'époque carolingienne mais on perpétue la forme des actes. Il veut perpétuer les pratiques de gouvernement des rois carolingiens.

Un autre signe du déclin du pouvoir royal capétien est le fait que le roi ne circule plus dans l'ensemble du territoire de son royaume. Il n'est plus en contact direct avec l'ensemble des grands du royaume comme par exemple le comte de Barcelone. Robert II le Pieux fait quelques pèlerinages mais qui n'ont pas de conséquences politiques directes. Jusqu'au règne de Louis VI les rois capétiens ne franchissent plus la Loire. A cette époque, le pouvoir royal se concevant dans des relations directes entre le roi et les grands princes, les liens entre eux et le rois s'amenuisent. Guillaume V d'Aquitaine évoque dans une lettre la nullité du roi, c'est-à-dire son inexistence. Les grands princes se sentent autoriser à se diriger eux-mêmes, comme des dominus, et à exercer des prérogatives régaliennes. Ainsi, à partir des années 1030, le pouvoir royal est fragilisé par le choc châtelain, c'est-à-dire par la monté en puissance des seigneurs châtelains comme les Montfort, les Montmorency, les Montlhéry, etc … qui enracinent leur lignage et récupèrent des prérogatives, notamment sous le règne d'Henri I. Le règne de ce dernier est mal connu car il y a peu d'actes qui sortent de la chancellerie. On sait de lui qu'il est encerclé par des princes plus puissants et qu'il ne maintient son autorité qu'à la faveur de troubles entre les grandes principautés. Il n'avait pas vocation à être roi car il est le deuxième fils de Robert II le Pieux, mais son frère est mort avant son père.

1.2.2. Une politique matrimoniale toujours ambitieuse.


Les rois capétiens continuent de chercher à obtenir des alliances prestigieuses. Ils s'autorisent d'ailleurs tous les arrangements et les entorses nécessaires avec la norme canonique qui est en train de se verrouiller pour éviter les mariages incestueux, c'est-à-dire entre parents directs et cousins de moins de sept degrés de parenté. Cela rend impossible un grand nombre d'alliances car les familles de l'aristocratie s'unissent entre elles. Les rois capétiens comme les grands princes ne cherchent donc pas à respec- -ter ces consignes matrimoniales. Il n'y a pas de grands scandales matrimoniaux lors du premier siècle capétien, du moins aucun qui a des répercussions politiques. Robert II le Pieux a été marié du vivant de son père à la fille du roi Bérenger d'Italie : Rosala-Su- -san. Elle est la veuve du comte de Flandres et apporte en dot Montreuil-sur-Mer, une tête de pont importante. Dès 996 Robert II répudie son épouse car il craint qu'elle ne lui donne aucun fils. Il met en avant ses liens de parenté au moment où cela l'arrange. Il répudie sa femme mais conserve la dot de cette dernière. Il épouse par la suite Berthe de Bourgogne, une femme plus jeune et donc plus apte à engendrer. C'est la fille du duc de Bourgogne, la petite-fille du roi de Germanie et la veuve du comte Eudes de Blois. Ces différentes affaires suscitent l'émotion de l'épiscopat. Rosala-Susan est en effet répudiée alors que le divorce est interdit. Berthe de Bourgogne est une cousine au troisième degré de Robert II le Pieux. Il y a donc un double problème. Gerber, archevêque de Reims, manifeste son désaccord. Le pape Grégoire V excommunie Robert II le Pieux en 997. Le témoignage d'Helgaud de Fleury, moine de Fleury-sur-Loire, montre comment Robert II est un roi chrétien agissant comme un moine provoquant des miracles. Il passe totalement sous silence les problèmes matrimoniaux de Robert II transforme les sept années de pénitence auxquelles il est condamné en année de piété. Robert II ne se sépare de Berthe qu'en 1003 par soucis d'appliquer les ordres du pape Grégoire V, un pape allemand cherchant à affaiblir le pouvoir royal capétien. Robert II épouse en troisième noces Constance d'Arles, la fille du comte de Toulouse, qui lui donne deux fils : Hugues et Henri.

En ce qui concerne le roi Henri I, il épouse une des nièces de l'empereur, la fille du prince de Kief. Elle lui donne trois fils : Philippe, Robert et Hugues. Il n'y a donc pas de scandales pour Henri I mais il n'établit pas d'alliances lui permettant de s'enraciner localement. En ce qui concerne Philippe I, il a la même logique que son grand-père Robert II. Dans la deuxième moitié du 11ème siècle, le pape conceptualise les rapport de force entre le pape et les pouvoirs temporels. Le papauté veut moraliser la conduite des laïcs et des clercs. Il y a un reconfiguration de la vie des chrétiens et de l'Eglise. Yves de Chartres, évêque de Chartres, est le porte-drapeau de cette réforme dite « grégorienne ». Il cherche à empêcher Philippe I d'épouser et de répudier qui il veut. Philippe I est tout d'abord marié à Berthe de Hollande qui lui donne un fils : Louis, futur Louis VI. Il répudie cette dernière en 1092 pour épouser Bertrade de Montfort, la femme du comte d'Anjou Foulques le Rechin. Mettre la main sur la femme du comte d'Anjou est un moyen de mettre un pieds en Anjou. Pour répudier sa première épouse, Philippe I réunit l'épiscopat pour déclarer qu'il y a bien parenté entre lui et sa femme, ce qui signifie le divorce, c'est-à-dire que le mariage est nul. Cet épiscopat, c'est-à-dire les archevêques royaux, accèdent à sa requête mais pas Yves de Chartres. Il refuse de se rendre à la convocation du roi, il alerte ses pairs sur l'irrégularité de ce nouveau mariage. S'enclenche alors une série d'assemblées et d'échanges de lettre entre les évêques jusqu'à l'excommunication de Philippe I en 1094 par le légat du pape et en 1095 par le pape lui-même.

L'excommunication est une arme spirituelle dont dispose la papauté pour faire respecter sa discipline. Elle a des conséquences graves car elle met le fidèle au ban de la communauté chrétienne. Il n'a plus accès aux sacrements, ne peut plus entrer dans une Eglise, ne peut plus avoir de contact avec un chrétien. L'excommunication, qui commence à être défini à cette époque, est d'abord pensée comme temporaire, c'est une sorte de remède que l'Eglise propose aux fidèles qui sont dans l'erreur. Réintégré à la communauté chrétienne, Philippe I est de nouveau excommunié car il ne s'est pas séparé de Bertrade de Montfort. Philippe I est de nouveau absout en 1098 puis excommunié une troisième fois. Le roi peut se permettre encore une certaine légèreté vis-à-vis de la règle canonique car il est soutenu par une partie de l'épiscopat comme les archevêques de Sens et de Tours. Selon eux les alliances matrimoniales sont des moyens privilégiés de garantir la paix, de restructurer les rapports de force. Les excommunications de Philippe I ont des conséquences. La deuxième a été confirmée par le pape lors d'un concile de paix à Clermont. En marge de ce concile le pape Urbain II prêche la croisade et incite les chevaliers du royaume à libérer le Saint-Sépulcre à Jérusalem. Il accorde des privilèges, des indulgences pour ceux qui vont en Orient. Toutefois, puisqu'il a jeté l'interdit sur le domaine royal, aucun de ceux qui s'y trouvent ne participent à la croisade. Les cloches n'y sonnent plus, les sacrements ne sont plus donnés.

En raison de l'excommunication du roi, l'un des problèmes majeurs est celui des investitures. C'est un affrontement entre le pouvoir pontificale et une certain nombre d'autorités politiques : le roi d'Angleterre, l'empereur, etc … Ils s'affrontent sur les mo- -dalités de désignation et d'investiture des évêques. Dans l'empire les évêques sont investis de leur charge spirituelle par l'empereur et non par le pape, qui estime que c'est à lui de le faire. En France, cela ne prend pas la même tournure que dans l'empire. L'empereur en effet dit ne plus reconnaître l'autorité du pape. Il est excommunié plusieurs fois et ses sujets sont déliés de leurs devoirs envers lui par le pape. En France donc, le roi étant excommunié, les évêques éprouvent une certaine réticence à obtenir de lui leurs gages spirituelles. Dès la fin du 11ème siècle (dans l'empire il faut attendre 1122), un accord est passé pour ce qui est des investitures. Yves de Chartres propose un modus vivendi pour que les évêques ne soient pas investis par un roi excommunié. Le pape est d'accord et le roi se contente de donner les insignes temporelles du pouvoir de l'évêque. En 1104, le nouveau pape Pascal II lève définitivement l'excommunication de Philippe I. En effet, le contexte géopolitique a changé et le nouveau pape a besoin du soutien du roi de France lutter contre l'empereur dans sa querelle des investitures. Il ne peut plus se permettre de perdre le soutien du roi de France.

1.2.3. Les prémices du redressement capétien sous Philippe I.

Un embryon d'administration domaniale apparaît sous le règne de Philippe I. Des prévôts sont mis en place au sein du domaine royal afin de veiller à son administration. De plus en plus d'actes sont produits par la chancellerie de Philippe I. 172 actes ont été conservés dont certains destinés à des personnes extérieures au domaine royal. La chancellerie du roi est sollicitées par des personnes extérieures au domaine royal qui désirent donner autorité à des documents par le pouvoir royal. En 1077 est publié un mandement contenant un ordre. C'est donc un document, un acte à valeur normative. Il ne s'agissait avant en effet que d'actes de droit privé. Ici, le roi dit quoi faire et impose son autorité. Il faut cependant attendre 1155 pour qu'un texte législatif, une ordon- -nance royale, une loi, soit promulguée par le roi (Ordonnance de Soissons). Philippe I parvient à remplir les caisses royales pour effectuer des rachats et étendre le domaine royal alors compris entre Senlisse et Orléans.

Lors de l'association au trône de Philippe I en 1059, un certain nombre de grands du royaume sont présents à Reims (duc de Bourgogne, duc d'Aquitaine, comte de Flandre, comte d'Anjou). Philippe I veut créer des offices curiales ou des offices palatio. Il donne plus de contenu à des charges domestiques qui commencent alors à avoir des résonances politiques : office de chancelier, de sénéchal, de connétable, de bouteiller, de chambrier, etc … Ces offices se structurent au sein de la cour du roi. A l'époque de Philippe II, le chancelier dirige la chancellerie, le sénéchal est à la tête des services domestiques du palais et de l'armée, le connétable s'occupe des écuries et à la haute main sur l'armée royale, le bouteiller s'occupe de l'approvisionnement des caves du roi, le chambrier contrôle la chambre et l'habillement du roi. Le roi propose de rémunérer les fidélités de châtelains locaux en leur proposant des charges honorifiques avec une déclinaison curiale et palatiale. On retrouve ses grands officiers de la couronne aux postes des grands souscripteurs. Les grands officiers de la couronne sont contraints de souscrire les actes royaux mais pas à l'époque de Phi- -lippe I. Le règne de Philippe I est intéressant car c'est la première fois qu'il y a une régence. En effet il n'a que sept ans quand il arrive sur le trône. La régence est donc instaurer jusqu'au treize ans du roi. C'est le comte de Flandre qui est nommé régent. Le règne de Philippe I témoignage d'une reprise en mains du pouvoir royal capétien.

2. La construction de la légitimité royale capétienne.

2.1. Les pratiques dynastiques conformes aux usages de l'aristocratie.


En 987, lorsque les Capétiens arrivent au pouvoir, ils forment déjà une dynastie. Ils se pensaient déjà comme un lignage dynastique car ils appliquaient les règles de transmission de l'héritage patrimonial et des titres politiques depuis le milieu du 10 ème siècle, conformément aux pratiques de l'aristocratie de l'époque. Dès le milieu du 10ème siècle, les Robertiens transmettent au fils aîné l'essentiel du patrimoine familial et des charges : marquisat de Neustrie, duc des Francs, etc … Cette conscience dynastique se décline à l'échelle des grandes familles princières et se manifeste par la primogéniture mâle et de manière symbolique par la dévolution du prénom. L'aîné reçoit le prénom du père ou du grand-père qui incarne l'autorité politique et seigneuriale. Les aînés bénéficient d'alliance matrimoniales prestigieuses. Ce sont toutes des pratiques propres à l'aristocratie. La pratique de l'association de son vivant de leur fils aîné au pouvoir rappelle certaines familles aristocratiques. C'est une pratique capétienne déjà un peu utiliser par les carolingiens. Ils en usèrent pour s'assurer que l'aîné hériterait seul et pour éviter qu'un descendant carolingien ne viennent réclamer le trône. Tous les rois jusqu'à Philippe II Auguste ont été associés par leur père à des moments plus ou moins précoces du règne. L'association de Philippe I est tardive car on ne pouvait pas prêter avant sept ans car l'Eglise considérait alors les héritiers comme trop jeunes. Robert II le Pieux est associé au pouvoir en 996, il associe ensuite son fils Hugues en 1017 mais celui-ci meurt en 1025. C'est alors Henri I qui est associé en 1025. Philippe I est associé au trône en 1059. Le futur Philippe II Auguste est associé en 1179. A partir de Philippe II Auguste il n'y a plus d'association au trône. Louis VIII n'est pas associé du vivant de son père, c'est en effet un signe du redressement capétien. Ce système d'association a un intérêt politique mais aussi un revers : le système de l'élection perd de son intérêt.

2.2. L'élection par les Grands.


L'élection est centrale en 987 au moment du changement de dynastie. Cette élection ne doit pas être perçut comme une élection démocratique mais plutôt comme un choix, un ralliement d'un grand nombre de grands dignitaires temporels ou ecclésia- -stiques qui suivent un homme fort. Cette pratique de l'élection a une double origine. Tout d'abord politique car elle rappel le système franc de l'acclamation du chef par ses soldats. Dans l'histoire du pouvoir politique en France cette tradition une permanence à l'idée que le chef politique est choisit par les hommes libres du royaume. Ensuite elle est originaire de l'élection de l'épiscopat, le fait que les évêques soient élus par les chanoines sur proposition. Il y a dans l'Eglise cette tradition de l'élection par la senior et major pars, c'est-à-dire par les meilleurs. Cette élection du roi à l'intérêt de souder les liens entre le roi et les grands du royaume. Le roi tire l'essentiel de son pouvoir des liens forts qui l'unit à l'épiscopat. A partir du moment où s'impose le principe de l'association du trône, le principe de l'élection se délite : les grands du royaume n'ont plus leur mot à dire sur le choix du roi. On demande symboliquement aux grands présents à Reims de valider le choix du roi par une acclamation intégrée dans le processus du sacre. Ce n'est pas forcément un bon choix stratégique car il éloigne le roi de l'aristocratie.

2.3. Le recours au sacre.

Les capétiens ne sont pas les premiers rois à être sacrés, en effet les carolingiens sont sacrés depuis longtemps. Le sacre est une cérémonie particulière devant conféré au roi son caractère quasi divin ou du moins une place au dessus des autres laïcs du ro- -yaume. C'est une pratique qui trouvent son modèle dans l'Ancien Testament et qui a été réactivée politiquement dans l'histoire à la fin du 7ème siècle par les rois wisigothiques. En France, Pépin le Bref reprend ce modèle du sacre car cet ancien maire du palais n'a pas pour lui la légitimité du sang. Il met en œuvre cette cérémonie à deux reprises. Il associe lors de la deuxième ses deux fils (751 et 756) dans la logique carolingienne du partage de l'héritage. Au 11ème et au 12ème siècles, le roi d'Angleterre est également sacré ainsi que celui de Sicile. En Espagne, la pratique du sacre est tombé en désuétude. En effet, la cérémonie du couronnement est beaucoup plus simple en Aragon car le sacre est une cérémonie liant la royauté au clergé et il existe une peur de donner trop de pouvoir au clergé.


Il existe peu de sources narratives présentant des sacres. On connaît le sacre par le biais de livres liturgiques appelés ordines. Ce sont des types d'ouvrages liturgiques existant pour d'autres circonstances également comme les messes. Ordo veut dire l'ordre des gestes et des paroles à prononcer. Dans le déroulement d'un sacre il y a toujours trois moments : un serment, puis une onction et enfin un couronnement. Avec le couronnement est rattachée l'acclamation du peuple, c'est-à-dire l'élection. Le sacre de l'époque moderne se met en place au 13ème siècle. Ce qui apparaît clairement c'est qu'il y a une messe solennel. Dès 869 apparaît le serment du roi en faveur de l'Eglise. En 1059, avec Philippe I, il y a une première apparition du serment de défense de l'Eglise. L'onction quand à elle, est l'apposition d'un baume. Il s'agit, comme pour la consécration d'un évêque, de l'apposition d'une huile provenant de la sainte ampoule. Hincmar, archevêque de Reims, évoque un épisode particulier lors du baptême de Clovis. Le saint esprit aurait apporté à Saint Rémi une ampoule contenant une huile sacré. Lors du sacre de Louis VII au 12ème siècle, un lien fort est crée entre le baptême de Clovis et le sacre de Louis. Le couronnement constitue aussi en la remise des insignes royaux : les rega- -lia. Les instruments qui ont servi au sacre et tous les symboles de l'autorité royale sont détruit volontairement à l'issue de la cérémonie, c'est-à-dire tout ce qui a été détruit par le saint chrême. On conserve toutefois les insignes du pouvoir royal, c'est-à-dire le sceptre, la main de justice, etc … Il apparaît au 13ème siècle l'évocation d'une épée remise lors du sacre.

En ce qui concerne les lieux du sacre, la plupart des sacres ont été accomplit à Reims mais pas tous. Le sacre est pendant longtemps resté à la charge de l'archevêque de Sens (Hugues Capet est sacré à Noyons) mais la ville d'Orléans a accueilli plusieurs sacres comme ceux de Robert II le Pieux et de Louis VI le Gros. Le fils aîné de Robert II a été sacré à Compiègne. Les grandes cathédrales sont sollicitées pour accueillir cette cérémonie du sacre. A partir des années 1130, le sacre se déroule à Reims. Suger n'a pas réussi à imposer Saint-Denis : seul y sont conservées les regalia. C'est à Saint-Rémi de Reims qu'est conservée la sainte ampoule, au sein du monastère.

Les rois de France sont ce qu'on appelle thaumaturges, c'est-à-dire qu'ils accomplissent des miracles. L'Eglise et les clercs sont réticents à l'idée selon laquelle des laïcs peuvent accomplir des miracles et sont donc peu enclin à évoquer ce pouvoir. Le sacre du roi lui confère une place prééminente au sein du monde laïc. Il rappelle dans son déroulement l'ordination des évêques. Cette cérémonie place le roi dans une situation quasi épiscopale, il est une sorte d'intermédiaire avec Dieu. Suger parle de Louis VI  comme d'un vicaire de Dieu. Dans un diplôme de Louis VII, il rappelle que seul les rois et les prêtres sont consacrer par l'onction du saint chrême. Les rois sont donc au dessus des clercs mais ne sont pas des clercs. Helgaud de Fleury, qui écrivit une vie de Robert II le Pieux évoque les miracles accomplit par celui-ci. Le miracle accomplissait le miracle de guérir les écrouelles à partir du 12ème siècle, dans un contexte de concurrence entre le roi de France et celui d'Angleterre. Il y a une surenchère entre les deux à qui accomplira des miracles.

2.4. Le tournant du 12ème siècle dans l'élaboration d'une idéologie royale.

Un certain nombre de penseurs commencent à réfléchir sur la nature de la fonction royale. La royauté commence à être pensée comme un objet de réflexion politique (Hugues de Saint-Victor, Jean de Salisbury). Ces deux théologiens du 12ème siècle ont marqué les écoles et diffusé la pensée aristotélicienne. Au 12ème siècle sont redécouverts les compilations juridiques de l'empereur Justinien, ce qui favorise la réflexion politique dont bénéficie la royauté. Le 12ème siècle est marqué par un  certain nombre d'avancées de l'idéologie royale, avancées imputables notamment à Suger (croyance dans les pouvoirs thaumaturgiques du roi, vertus surnaturelles de l'onction). S'impose également l'idée selon laquelle les insignes du pouvoir royal, c'est-à-dire les regalia, doivent être conservées à l'abbaye de Saint-Denis. La nécropole royale est reconfigurée, les tombes royales sont déposées de telle sorte que symboliquement est mise en place une continuité dynastique entre les rois capétiens et les rois mérovingiens et carolingiens. Isabelle de Hénault, épouse de Philippe-Auguste, est une descendante de Charlemagne. Donc tout un ensemble d'actions symboliques qui mettent en place cette idée selon laquelle les rois capétiens sont eux aussi les descendants de Charlemagne.

3. L'affirmation de la royauté capétienne au 12ème siècle.

3.1. Les avancées capétiennes en matière territoriale.

3.1.1. Le règne de Louis VI « le Gros » (1108-1137).

L'essentiel des avancées territoriales du domaine sont dues au roi Philippe 1er grâce à une meilleur exploitation financière. Avec Louis VI et Louis VII on note surtout une avancée de la pacification du domaine royal. Louis VI est le seul fils légitime de Philippe 1er, qu'il a eu avec sa première épouse. En dépit des ambitions de Bertrade de Montfort, Philippe 1er associe dès 1092 son fils au comté de Vexin (que Philippe 1er vient de racheter). Louis VI est associé au trône dès les années 1100 mais il n'est pas sacré car son père est alors excommunié. Il n'est réellement sacré qu'à la mort de son père en 1108, de manière assez précipitée, immédiatement après les funérailles de son père, à Orléans. Il souffre d'un certain déficit d'autorité, ce qui implique que les trois principaux ducs du royaume (Normandie, Aquitaine, Bourgogne) refusent de prêter hommage à celui-ci. Louis VI parvient en 1124 à réunir autour de lui l'ensemble des barons du royaume lorsque l'empereur Henri V menace d'envahir le territoire. Louis VI a surtout consacré son énergie à pacifier le domaine royal et à lutter contre les châtelains turbulents du domaine (contexte de la réassurance des princes). Thomas de Marle, l'un des barons de la première croisade, est ainsi bridé par Louis VI. Hugues du Puiset en est un autre exemple ainsi que la famille des Montlhéry-Rochefort. Louis VI engage aussi une politique de sécurisation permanente du domaine, à travers la sûreté des routes, la lutte contre le brigandage, etc …

3.1.2. Le règne de Louis VII « le Jeune » (1137-1180).

C'est le deuxième fils de Louis VI et d'Adélaïde de Savoie. Il est sacré par anticipation dès 1131 à la mort de son frère aîné. Il a une attitude assez ambiguë à l'égard de l'Église. Avant 1142 il semble malmené l'Église. Toutefois, à partir de 1142 et donc du massacre de … , il change et se rapproche de l'image de son père, c'est-à-dire celle d'un pacificateur. Il est assez peu intéressé pour les grandes opérations militaires, toutefois, à partir de Louis VII, le roi commence à voyager au sud de la Loire, renoue des relations avec les princes méridionaux. Il épouse la fille du duc d'Aquitaine en 1137 : Aliénor d'Aquitaine, tout de suite après son sacre. Bien que trop proche par le sang, celui-ci n'est pas empêché pat l'Église car Suger réfléchit alors comme un homme d'État plus que comme un homme d'Église. Ce mariage n'aboutit pas, car dès 1152 Louis VII annule son mariage avec Aliénor d'Aquitaine car cette dernière entretient des relations indécentes avec des barons du royaume. C'est un très mauvais calcul politiquement car Aliénor d'Aquitaine épouse quelques semaines plus tard le futur roi d'Angleterre. Le reste de la politique militaire de Louis VII se situe en Champagne et en Normandie principalement. C'est sous le règne de Louis VII que le première ordonnance est promulguée à Soissons en 1155,  c'est un texte de paix dans lequel le roi s'engage à assurer la pacification du royaume.

3.1.3. Le règne de Philippe II « Auguste » (1180-1223).


C'est un règne bien documenté et marqué par une véritable montée en puissance du pouvoir royal sur environ tous les domaines, et notamment d'un point de vue territorial. Cela commence dès 1186 par l'octroi du surnom « auguste » à Philippe II par Rigor. Ce surnom est accordé à Philippe II dans un contexte particulier, c'est-à-dire celui de la confirmation en 1185 par le traité de Boves de la concession de l'Artois, de la région d'Amiens et du Vermandois. Ce traité de Boves confirme et renforce la dote d'Isa- -belle de Hénault lors du mariage de Philippe II. Elle est fille du comte de Hénault et nièce du comte de Flandres. Ce-dernier décide de s'allier avec la maison de Blois-Champagne et du duc de Bourgogne. Les affrontements tournent à la faveur du roi de France, et à la suite d'une guerre de siège, le comte de Flandres, Philippe d'Alsace, est obligé d'entériner le mariage de sa nièce avec Philippe II. Il faut attendre 1214 et la bataille de Bouvines pour que le comte de Flandres décide de définitivement se soumettre à Philippe II. Il lutte également contre le roi d'Angleterre Jean-Sans-Terres. En 1202 est prononcée une commis de fiefs contre Jean-Sans-Terres, vassal de Philippe-Auguste. En 1204 la Normandie et l'Anjou-Maine reviennent dans le giron du roi de France (prise de château Gaillard le 10 mars 1204). Le roi peut alors faire la route jusqu’à Rouen. Le roi Jean ne conserve que ses possessions de Gascogne et d'Aquitaine. Jean Sans Terre participe à la coalition de 1214 entre l'empereur Otto IV et deux comtes du royaume : le comte de Boulogne, Renaud de Dammartin (victime en 1211 d'une commise de ses fiefs) et de Flandre, Ferrand de Portugal. Ce dernier, ayant obtenu le comté de Flandre grâce à Philippe Auguste, se retourne contre lui et fait partie des perdants de Bouvines le 27 juillet 1214. Jean sans Terre est défait le 2 juillet 1214 à la Roche aux Moines par le futur Louis VIII.


Bouvines est le premier exemple de la levée de l'ost de communes. En effet, les communes de tout le royaume ont envoyés des contingents pour participer à la bataille. Philippe II Auguste soutint également le soulèvement seigneurial lorsque celui-ci se produisait au sein des principautés de ses adversaires. La bataille de Bouvines à particulièrement marqué l'histoire, c'est un moment clef dans l'affirmation du pouvoir royal capétien. La propagande capétienne est immédiate. En étudiant les sources impériale et anglaise, on ne trouve pas de retentissement à l'échelle de la chrétienté. La place est particulière dans l'histoire de France car il y eut peu de batailles de ce genre à l'époque médiévale.

Le troisième front d'extension territorial des rois capétiens, dans le sud, est indirect mais symbolique. Sous le règne de Philippe II Auguste se prépare en effet l'implantation royale dans le Midi. En effet le début du 13ème siècle est marqué par une réorientation de l'idéal de croisade prêché par Innocent III contre les cathares, c'est-à-dire les albigeois. C'est la première fois que des privilèges sont accordés aux croisés qui iraient mater l'hérésie cathare du Midi. Simon de Montfort, un grand baron, prend la tête de cette croisade et remporte une victoire importante en 1213 : la victoire de Mure. Il s'agit d'une avancée du pouvoir royal capétien car Simon de Montfort prêtre hommage à Philippe II Auguste pour le fief qu'il tient désormais dans le toulousain. Il se place ainsi en position de soumission au pouvoir royal et considère ses conquêtes comme réalisées au nom de la couronne. Commence alors à s'imposer l'idée d'un royaume cohérent. Le pouvoir est suffisamment affermi pour penser victoire territoriale soit imputable à la royauté. Pour la première fois le roi se présente comme le roi de France et non plus comme le roi des Francs. Le pape Innocent III reconnaît dans un décret en 1202 que le roi de France n'a aucun supérieur sur le plan temporel. Philippe II Auguste est un roi ayant considérablement augmenté le domaine royal, affermi son autorité et comprenant qu'il n'est plus obligé d'associer son fils aîné au trône. A sa mort en 1223 des funérailles solennelles sont organisées avec un faste nouveau rappelant celui des rois Planta- -genêts car pour la première fois le roi est revêtu des insignes des sa fonction régalienne (épée, main de justice, etc …).

3.2. L'affirmation d'une royauté féodale.

3.2.1. Les relations féodaux-vassaliques.

On peut considérer qu'au sein du groupe aristocratique chaque individu est insérer dans un réseau de relations féodaux-vassaliques. Chacun est vassal d'un seigneur plus puissant et le seigneur d'un mois puissant. Ces relations féodales vont se développer et se diffuser. La féodalité désigne un ensemble d'institution créant et régissant des obligations d'obéissance de la part d'un homme libre à l'égard d'un autre homme libre. Ces relations féodaux-vassaliques ne s'exercent qu'au sein du groupe aristocratique. A tout moment le vassal ou le seigneur peut décider de se séparer. Toutefois, cela est rare car cela mettrait en péril la structure sociale de l'aristocratie codifiée par le droit féodal. S'il considère que le seigneur ne respecte par ses engagements, le vassal peut rompre son serment en rendant ses fiefs. Inversement, le seigneur peut considérer que son vassal ne remplit pas son devoir et confisquer ses fiefs, c'est la commise. Les relations féodaux-vassaliques s'exercent à deux échelles de pouvoir : à l'échelle des chevaliers et des seigneurs où elle a un rôle militaire, et à l'échelle des princes et du roi où elle a un rôle politique. Dans ces deux cas : les obligations sont les mêmes mais les pratiques ne sont pas comparables. Dans les deux cas il y a une obligation de fidélité et de service.

Dans les relations féodaux-vassaliques, il y a d'une part un engagement personnel et ensuite un élément réel. La vassalité naît d'un double rituel : un rituel d'hommage et un serment de fidélité. Un homme libre devient le vassal d'un seigneur en se déclarant être son homme, d'où le mot hommage. Le mot vassal n'apparaît pas à cette époque. Ce rituel d'hommage est la première partie du rituel de vassalité. Il y a une parole et un geste, c'est-à-dire une génuflexion, puis le vassal met ses mains dans celles de son seigneur (immixtio manum) et enfin embrasse son seigneur (osculum). Vient ensuite dans une deuxième partie un serment de fidélité classique prêté sur des reliques, la bible. Cette entrée en vassalité, ce rituel vassalique, conduit à un second rituel qui est l'investiture d'un fief. Ainsi, après la dimension interpersonnelle arrive la dimension réelle. L'élément réel, au sens concret, est la concession d'un fief, c'est-à-dire d'un revenu, par le seigneur à son vassal. De ces deux éléments découlent des obligations récipro- -ques. En allemand, un fief désigne une tête de bétail, c'est-à-dire un bien, un revenu, une rente, etc … La déclinaison des types de fiefs est extrêmement vaste, cela dépend de la puissance du seigneur et du vassal. Les grands du royaume sont des feudataires de la couronne.Il y a donc une véritable reconfiguration des modalité d'exercice du pouvoir.

A la suite des rituels de vassalité sont créés des relations propres au vassal et au seigneur. Obligation du vassal de ne pas nuire à son seigneur et de l'aider et de le conseiller. Ces différents éléments sont apparus progressivement au fur et à mesure des pratiques. Un des premiers témoignages de ces obligations est une réponse de l'évêque de Chartres au duc d'Aquitaine. Dès les années 1020 l'évêque de Chartres essaie de synthétiser les obligations qu'impliquent le serment de vassalité. L'aide que doit apporter un vassal à son seigneur est surtout militaire. Il peut s'agir de la garde d'un château ou une participation à l'ost. Le conseil consiste lui à la présence à la cour du seigneur. Lambert d'Ardres fait allusion à une grande salle où la cour féodale se réunit. Cette cour seigneuriale se compose des vassaux et est y appliquée la justice du seigneur. Au 11ème et au 12ème siècle l'aide et le conseil sont encore assez floues, mais l'aide militaire est clairement délimitée.

Dès le début du 11ème siècle on commence a trouver l'idée selon laquelle le vassal ne doit pas nuire à son seigneur, et il lui doit aide et conseils. En contrepartie, le seigneur concède un fief. C'est la principale des obligations du seigneur envers son vassal, c'est le réel des relations féodo-vassaliques. Un fief n'est pas toujours un territoire mais parfois un revenu. En théorie, les fiefs ne sont pas héréditaires car la détention d'un fief est lié à l'émission d'un hommage d'un vassal envers son seigneur. Toutefois, dans les faits, le caractère héréditaire du fief s'impose. Un vassal entend léguer le fief qu'il avait réussit à obtenir de son seigneur. Comme le fief ne peut pas être en soi héréditaire, un héritier ne peut se saisir de plein droit du fief de son père qu'en obtenant du seigneur de son père le droit de lui prêter à nouveau hommage. Le seigneur n'ayant plus à partir du 12ème siècle le droit de refuser l'hommage du fils de son vassal. Les plus puissants seigneurs parviennent à obtenir le paiement un relief, assurant ainsi au vassal le droit de prêter à nouveau hommage au seigneur de son père. En 1212, Philippe II Auguste permet à Ferrand de Portugal de devenir comte de Flandres à l'occasion d'une crise de succession du comté de Flandres, à condition qu'il lui verse un relief s'élevant à 50 000 livres en raison de la puissance du comté de Flandres, permettant à Ferrand de rendre hommage à Philippe II Auguste. Ferrand épouse par la suite la fille du comte Baudoin de Flandres décédé, avec l'autorisation du roi de France, renforçant ainsi la légitimité de ce dernier sur le comté de Flandres. Cette hérédité des fiefs entraînent un perfectionnement des règles féodales notamment en ce qui concerne les règles d'héritage.

Le seigneur à également des obligations d'entretien et d'éducation des fils mineurs non-éduqués d'un vassal décédé. Il a aussi l'obligation de marier la fille célibataire d'un vassal décédé. Ainsi se développe un certain nombre de règles et d'obligations entre les seigneurs et les vassaux, qui structurent les relations au sein du groupe aristocratique. Le vassal peut attendre de son seigneur qu'il lui permettent de mettre en place un lignage grâce à la dotation d'un fief et qu'il lui rende justice. Il faut attendre le 13ème siècle pour commencer à voir clairement « l'aide au quatre cas » du vassal au seigneur. Il a fallu différencier les types d'hommages, on distingue l'hommage plein et l'hommage lige (libre de tout autre liens). Cela signifie qu'un vassal prêtant un hommage lige doit privilégier ce seigneur à un autre seigneur. Les rois capétiens ont imposé aux barons du domaine royal des hommages liges, c'est-à-dire privilégiés. En cas de félonie du vassal, le seigneur peut confisquer les fiefs de son vassal, c'est la commise de fief.

3.2.2. L'exploitation croissante du droit féodale par le roi.


Ils ont tirés profit de ces obligations, et notamment de cette idée selon laquelle les grandes principautés du royaume sont des fiefs tenus de la couronne. C'est l'exercice du droit féodal qui permet de ce hisser au somment de la pyramide féodale. Ils recherchent désormais à exploiter au mieux les prérogatives féodales qui sont les leurs. Louis VI parvient à lever l'ost en 1124 et Suger conceptualise pour le roi la réserve d'hommage. A la fin du 11ème le comté de Vexin est racheté par Philippe 1er et en confie la garde à son fils le futur Louis VI. Lorsque Louis VI doit être investi du comté du Vexin, il ne peut l'être que par l'abbaye de Saint-Denis, qui est le seigneur du Vexin. Suger, particulièrement attaché à l'idée d'une mission royale sans concurrence, il écrit un diplôme dans lequel il justifie qu'il peut remettre l'étendard du comté de Vexin à Louis VI,il accueille Louis VI dans sa vassalité mais il le fait sans demander au roi de lui prêter hommage, le roi ne prête pas hommage à un autre seigneur. Suger conceptualise une exception royale, la réserve d'hommage. Cela fait de Louis VI un feudataire de Saint-Denis mais non un vassal de Saint-Denis. Cette réserve d'hommage n'a pas été inventé de toute pièce par Suger, mais elle a été théoriser au concile de Clermont en 1095 où est établit qu'un clerc a qui ont concède un fief n'a pas à prêter d'hommage à un seigneur laïque.

C'est surtout Philippe Auguste qui fait régulièrement appel à cette réserve d'hommage, notamment en 1185 lorsqu'il récupère le comté d'Amiens à l'évêque d'Amiens. Cette idée selon laquelle le roi ne tient de personne, conforte le roi au sommet de la pyramide féodo-vassalique, position également confortée par d'autres mesures comme systématiser les prestations d'hommages de tous les autres vassaux du royaume et notamment des grands barons pour que son autorité soit reconnus légitime au sein de son fief. A partir de 1202, le roi impose que les vassaux de ses vassaux ont aussi des obligations envers lui. A partir du milieu du 12ème siècle, le roi commence à rassembler de grands assemblées royales (1155 à Soissons ou Louis VII promulgue la première ordonnance officielle).

3.3. Gouvernement et administration locale : le 12ème siècle et les innovations institutionnelles.

Au 12ème siècle commence à s'imposer l'idée d'un gouvernement centrale capétien. Cela passe par la fixation d'organes de gouvernement à Paris, qui commence alors à s'imposer comme capitale. Cela participe à l'affirmation de l'idée d'un gouverne- -ment centrale. Il y a coexistence de deux institutions : la mesnie royale et la cours du roi. La mesnie royale regroupe tous les familiers du roi dont les tâches sont à la fois politiques et domestiques. C'est sous le règne de Philippe I que sont crées les premiers grands offices de l'hôtel du roi. Au 12ème siècle ces offices se maintiennent et permettent au roi de s'assurer des fidélités. Ces grand offices ont une déclinaison à la fois domestiques et politiques. Ceux que l'on nomme des palatins, c'est-à-dire ceux qui sont convocables à la cour du roi, sont théoriquement tous les vassaux du roi tenant en fief l'essentiel de leurs biens et de leurs revenus. L'hôtel du roi ne comprend pas tous les grands du royaume de manière permanente, mais seulement les proches. Suger, par exemple, s'est imposer comme un proche du pouvoir royal car il s'intègre par mi les intimes et les familiers du roi.

Il faut attendre la seconde moitié du 12ème siècle pour que la fonction de conseiller politique du roi se rattache à un organe spécialisé distinct de l'hôtel du roi, que l'on va commencer à appeler le conseil. Les sessions du conseil reste encore des réunions informelles autour du Capétien avec des membres de l'hôtel et qui vise essentiellement à aborder des questions d'ordre politique et judiciaire. Au niveau central, au plus proche du roi, on commence à voir se distinguer l'hôtel du roi et ses offices, et le conseil du roi dont les vidés sont plus politiques. Autre point, la fonction de justice s'incarne à la cour du roi. Tous les vassaux du roi peuvent saisir la cour du roi pour demander justice.

Le 12ème siècle est aussi un moment d'innovation et de perfectionnement institutionnel. Sous le règne de Louis VII on constate que les prévôts ont été multipliés à l'échelle du domaine royal. A la fin du règne de Louis VII on en dénombre 40 qui administrent le domaine royal, qui encadrent la population au quotidien et qui exercent une justice de base. Les prévôts affermissent leur charge en achetant le droit d'exercer leur autorité sur le domaine. Ce système dit de l'affermage est l'une des solutions avancé au 12ème siècle pour permettre au roi d'établir des budgets. Cette affermage témoigne de la monétarisation croissante de l'économie car c'est en numéraire que se réalise l'affermage et que les prévôts lèvent les revenus seigneuriaux. Pour les dépendants, on constate que toute une série d'anciennes corvées sont transformées en numéraire. A mesure que ce monétarise l'économie et que s’institue l'affermage des prévôts, la fonction devient de plus en plus technique et c'est la raison pour laquelle se modifie progressivement les modalités de recrutement des prévôts. On constate que l'hérédité des charges prévôtales est de moins en moins la règle car le roi doit s'assurer d'agents compétents pour par exemple convertir les monnaies.

Sous le règne de Philippe Auguste intervient une innovation institutionnelle essentielle qui est la création d'une nouvelle charge : le bailli. C'est un agent du seigneur qui a la charge de surveiller les prévôts. Les baillis existaient déjà en Normandie ou en Flandres, le roi ne fait qu'importer dans le domaine royale une technique qui fonctionne déjà ailleurs. Cette nouvelle charge est datée de 1190 et du testament de Philippe II Auguste. C’est une ordonnance promulgué par le roi avant qu'il ne s'engage pour la  3 ème croisade : il y règle les principales affaires du royaume avant de partir. Philippe II Auguste fait promulguer une ordonnance qui a pour finalité d'assurer le bon fonctionnement du domaine royale et qui réglemente la perception des revenus du domaine. Les baillis contrôlent les prévôts dont le nombre est croissant à mesure que le domaine royal s’agrandit. Le bailli doit surveiller les prévôts et a des responsabilités dans la perception des revenus du domaine.



Dans l'ordonnance de 1190 sont prévu des versements trois fois par an des revenus ordinaires du domaine au trésor royal et ces versements doivent être faits au Temple à Paris. Il n'est plus fait état d'un versement du trésor royal dans la chambre du roi : les templiers ont la garde du trésor royal. Le versement doit faire l'objet d'un registre, il y donc bureaucratisation des finances. C’est un véritable bureau de compte avec un clerc, un officier spécialisé et des bourgeois parisiens. Il s'agit des prémices de la chambre des comptes. Les baillis encadrent la remonté des revenus du royaume au temple. Ils exercent aussi des fonctions judiciaires et représentent la justice du roi. Ils ont l'obligation de tenir des sessions de justice un jour par mois pour recevoir les plaintes des dépendants du domaine royale. Le roi attend de ces baillis qu'ils fassent le point sur les actes délictueux commis par les prévôts et qu'il fassent remonter les informations générales sur la tenu du domaine royale. Il y a donc prise de conscience nouvelle qu'il faut que l'information remonte jusqu'au roi.
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CM – POUVOIR ET SOCIÉTÉ EN FRANCE AUX 11ÈME ET 12ÈME SIÈCLES – MME AVIGNON - Partie 3
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